De la même façon qu’en France en juillet dernier, une juridiction nationale vient de contraindre les Pays-Bas à prendre d’urgence un plan pour rétablir la qualité de l’air. L’illustration d’une pression judiciaire grandissante sur les Etats.

Les décisions judiciaires contraignant les Etats à agir en matière de pollution de l’air s’enchaînent. Après la France en juillet dernier, c’est au tour du gouvernement des Pays-Bas de se voir rappelé à l’ordre par une juridiction nationale.

Par une décision prononcée jeudi 7 septembre, le juge des référés du tribunal de La Haye a en effet enjoint le gouvernement néerlandais de prendre des mesures d’urgence en matière de qualité de l’air, révèlent Les Echos. Ce dernier est tenu d’adopter dans les délais les plus brefs un plan permettant de se mettre en conformité avec les valeurs limites en dioxyde d’azote (NO2) et en particules fines (PM10) prévues par la directive européenne sur la qualité de l’air ambiant.

Avec plus de célérité encore, la juridiction néerlandaise demande au gouvernement d’identifier sous quinze jours tous les sites où existent ou sont prévus des dépassements de ces valeurs limites. Le jugement interdit également à l’exécutif de prendre toute nouvelle mesure qui pourrait conduire à dépasser les normes européennes. Ce qui pourrait remettre en question la récente décision du gouvernement néerlandais d’augmenter la vitesse maximale de 120 à 130 km/h sur l’ensemble des autoroutes du pays.

L’Etat ne fera pas appel

Cette décision résulte d’une action judiciaire intentée par les associations Dissimilitude et Adem in Rotterdam, qui déploraient que l’Etat ne respecte pas les normes européennes relatives au dioxyde d’azote et aux particules fines. Les Pays-Bas ont en effet obtenu de la Commission européenne un report d’application à 2011 de la valeur limite pour les PM10 et à 2015 de celle portant sur le NO2. Or, ces valeurs limites restent dépassées dans plusieurs zones du royaume. De plus, relève la juridiction, le plan actuel ne vise qu’une échéance de mise en conformité en 2020, sans d’ailleurs apporter l’assurance que cette échéance puisse être respectée.

« C’est une percée décisive pour un air sain. Nous sommes heureux que le juge force l’Etat à mieux protéger la santé des citoyens. Ceci est également très prometteur pour le million de patients atteints d’affections pulmonaires aux Pays-Bas« , a réagi Anne Knol de l’ONG Milieudefensie, selon des propos rapportés par le journal De Volksrant.

« L’air pur est vital« , a réagi de son côté la secrétaire d’Etat néerlandaise à l’environnement Sharon Dijksma en indiquant qu’elle ne ferait pas appel de la décision. Celle-ci s’est dite disposée à mettre en œuvre la décision de justice. Un engagement sans doute plus facile à prendre lorsque l’on fait partie d’un gouvernement sur le départ. Selon la représentante du gouvernement, ce plan ciblera les sites les plus pollués comme les centres villes, les zones à forte activité industrielle ou encore les élevages intensifs. L’Etat n’en a toutefois certainement pas fini avec la justice, le tribunal de La Haye devant encore se prononcer le 14 novembre 2017 dans le cadre d’une procédure au fond cette fois.

Montée en pression sur les Etats

Cette décision néerlandaise participe à une montée en force de la pression exercée par les ONG sur les Etats via des actions judiciaires de plus en plus abouties. En France, Les Amis de la terre ont obtenu en juillet dernier une décision très proche de la part de la plus haute juridiction administrative. En effet, le Conseil d’Etat a enjoint le Gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que soient mis en œuvre « dans le délai le plus court possible » des plans permettant de ramener les concentrations en dioxyde d’azote et en particules fines dans les limites de la directive.

Ces deux décisions font application de la jurisprudence ClientEarth de la Cour de justice de l’UE selon laquelle le respect des valeurs limites fixées par la directive sur la qualité de l’air ambiant constitue une obligation de résultat et pas seulement une obligation de moyens.

Cette pression judiciaire s’exerce dans le domaine de la pollution atmosphérique mais également dans celui du climat. L’action de l’association Urgenda, aux Pays-Bas déjà, a joué un rôle précurseur en la matière, inspirant des actions semblables du collectif Klimaatzaak en Belgique, de l’association Notre affaire à tous en France ou des ONG Our Children’s Trust et Earth Guardians aux Etats-Unis.