Plus d’un milliard d’animaux sans défense n’auront vécu qu’une semaine en 2020, le feu en a décidé ainsi sur le territoire australien. Après l’Amazonie en été 2019, ces flammes plus dévastatrices embrasent une surface de forêt tellement importante qu’elle hystérise la toile. Pendant que nos déchets plastiques continuent de mener une guerre féroce contre les animaux aquatiques qui eux meurent par asphyxie en ingurgitant nos immondices, sur la terre le feu assure.

Un patrimoine forestier en crise

Le plus grand prédateur de la biodiversité terrestre durant ces six derniers mois est bel et bien le feu. Il a tendance à surprendre tout le monde, arrivant si rapidement qu’il sature les capacités humaines à en mesurer la portée et à y faire face. Pourtant en 2018 le Camp Fire, l’incendie le plus meurtrier de Californie avait ravagé 60 mille hectares de forêt et emporté 85 vies humaines. En été 2019, le monde entier assista impuissant à la destruction par le feu d’environ 900 mille hectares de forêt en Amazonie et plus de 700 mille feux ont été détectés dans la forêt du Congo, deuxième plus vaste couvert végétal tropical, là où Greenpeace révèle 15 millions d’hectares exploités illégalement entre 2002 et 2008. Notre patrimoine forestier est en crise. Cependant il n’y a rien de surprenant. En effet, le cinquième rapport biennal produit en 2018 par l’Organisation de recherche scientifique et industrielle du Commonwealth (CSIRO) et le Bureau australien de météorologie dressait en son temps le tableau cohérent mais sombre des changements climatiques en cours en Australie. Selon ce rapport le climat australien s’est réchauffé d’un peu plus de 1 ° C depuis 1910, entraînant une augmentation de la fréquence des événements de chaleur extrême et les océans autour de l’Australie se sont réchauffés d’environ 1 ° C depuis 1910, contribuant à des vagues de chaleur marines plus longues et plus fréquentes. Ces prévisions n’empêcheront pas les récents incendies emportant 8 millions d’hectares de forêt soit plus d’un quart du territoire ivoirien mais montrent clairement que ces feux sont imputables au réchauffement climatique qui en asséchant la végétation conduit à une accentuation de la récurrence des feux de forêt autrefois naturels.

Le feu dans la forêt, phénomène naturel mais l’homme…

Le feu dans la forêt ne devrait pas inquiéter mais l’action humaine, à la base de tous les déséquilibres écologiques, a profondément modifié le cycle naturel qui existait entre celui-ci et les forêts. Les experts du secteur forestier s’accordent à dire qu’il fait partie intégrante de l’histoire des forêts car auparavant en période estivale, cela permettait l’émergence d’autres espèces, structurait progressivement le couvert végétal et offrait les minéraux inhérents au développement d’une végétation plus complexe. Ce mécanisme a été hélas dénaturé, transformant cet élément régénérateur de biodiversité en un fait destructeur voire sinistre, les forêts n’ayant plus suffisamment de temps pour se reconstruire naturellement. A long terme, l’intégrité de la biodiversité pourrait en être altérée. Si en Afrique, la culture sur brûlis et l’exploitation du bois ont fait passer le couvert végétal ivoirien de 16 millions d’hectares en 1960 à moins de 2,5 millions d’hectares aujourd’hui, ailleurs des actes malveillants et la négligence ont produit le même effet néfaste.

La forêt, une indispensable ressource négligée

Le monde tel qu’on le connaît semble avoir vacillé. C’est un monde productiviste, hyper capitaliste, un monde de grands bouleversements, où les espèces qui survivent sont celles qui s’adaptent le mieux au changement (Darwin). Elle est passée cette époque où le progrès donnait envie de vivre et donnait espoir en des lendemains meilleurs. Elle a laissé place à l’inquiétude, à l’incertitude et au questionnement sans fin sur l’épuisement des ressources. Il est impossible que l’humanité arrive à survivre sans les arbres, surtout dans les conditions actuelles car cela suppose de trouver une énergie inépuisable capable d’absorber la même quantité de Co2, réguler le cycle de l’eau et fournir l’humidité nécessaire à la survie de certaines espèces et même de l’agriculture. Mais aussi, la maladie étant l’un des pires ennemis de la vie, il faut dire que la suppression de la forêt originelle, même si elle est remplacée par une végétation artificielle, entraine la disparition de nombreuses espèces d’intérêt médicinal inégalé.

Nous faisons partie de cette génération, peut-être la dernière, qui peut encore changer les choses. Même si l’actualité géopolitique dominée par la menace d’une troisième guerre mondiale semble avoir plus d’éléments d’analyses médiatiques que la situation d’urgence environnementale, nous aurons tant à perdre si toute la biodiversité tombait en ruine par notre insouciance déraisonnée. Au delà de toute hystérie collective, nous n’avons pas d’autre choix que d’agir car la crise écologique en cours ne laissera bientôt à personne le choix de l’ignorer.

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