Les organismes vivant dans les sols jouent un rôle crucial pour ce qui est de stimuler la production alimentaire, de rendre les régimes alimentaires plus nutritifs, de préserver la santé humaine, et de lutter contre la pollution et le changement climatique. Cependant, leur contribution demeure largement sous-estimée, a indiqué aujourd’hui l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) dans son rapport sur l’état des connaissances relatives à la biodiversité des sols. Ce document a été lancé à l’occasion de la Journée mondiale des sols, célébrée le 5 décembre.

Bien que l’appauvrissement de la biodiversité soit au premier plan des préoccupations mondiales, la biodiversité des sols ne se voit pas accorder l’importance qu’elle mérite; elle doit être pleinement prise en compte dans la planification des interventions en faveur du développement durable, est-il précisé dans le rapport.

«Les sols ne sont pas seulement le socle des systèmes agroalimentaires et le lieu de 95 pour cent de la production alimentaire; leur santé et leur biodiversité sont cruciales pour éliminer la faim et mettre en place des systèmes agroalimentaires durables», a déclaré M. Qu Dongyu, Directeur général de la FAO, lors de la cérémonie organisée aujourd’hui à l’occasion de la Journée mondiale des sols.

Toutefois, il a signalé que la santé des sols déclinait et que les nombreux services écosystémiques fournis par ceux-ci s’amenuisaient également. Afin d’éviter les conséquences dramatiques que cette évolution pourrait avoir sur la sécurité alimentaire, la nutrition, le changement climatique et le développement durable, il a appelé à mener une action urgente pour exploiter le potentiel des ressources génétiques qui vivent dans les sols.

Dans son allocution, M. Qu a insisté sur la nécessité de créer un système mondial d’information sur les sols qui soit efficace et en accord avec le développement du numérique dans l’agriculture et les innovations en matière d’environnemétrie, afin de protéger les «héros silencieux et dévoués» que sont les organismes vivant dans les sols.

«Comme le dit un proverbe chinois: “Le sol est la mère de toutes les créatures terrestres.” Alors ne négligez pas la mère qui vous nourrit», a expliqué le Directeur général de la FAO.

Les sols sont l’un des principaux réservoirs mondiaux de biodiversité. Ils abritent plus de 25 pour cent de la diversité biologique de la planète. En outre, plus de 40 pour cent des organismes vivants qui appartiennent aux écosystèmes terrestres ont un rapport avec le sol à un moment ou un autre de leur cycle de vie.

Mme Elizabeth Maruma Mrema, Secrétaire exécutive de la Convention sur la diversité biologique (CDB), a déclaré dans un message vidéo adressé à l’assemblée: «Il est urgent de reconnaître que la biodiversité des sols est indispensable à la sécurité alimentaire et à la réalisation des objectifs de développement durable (ODD). Cette biodiversité sous-tend la productivité et la résilience de l’agriculture, rendant ainsi les systèmes de production et les moyens d’existence plus résistants aux chocs et aux facteurs de stress.»

Le nom des lauréats du Prix mondial des sols Glinka et du prix Roi Bhumibol de la Journée mondiale des sols a été annoncé.

Pendant la cérémonie, le Prix mondial des sols Glinka 2020, du nom du scientifique russe Konstantin D. Glinka, pionnier dans ce domaine, a été décerné au spécialiste italien des sciences agricoles Luca Montanarella, de la Commission européenne. Ce dernier est reconnu comme un ardent promoteur de la sensibilisation à la question des sols en Europe et dans le monde, qui soutient l’intégration de connaissances scientifiques sur les sols dans l’élaboration de politiques. La médaille Glinka, en métal plaqué or, lui a été remise par le Directeur général de la FAO.

  1. Victor Vasiliev, Représentant permanent de la Fédération de Russie auprès de la FAO, qui a remis la récompense financière, a souligné l’importance de promouvoir les approches agroécologiques, qui mettent davantage l’accent sur l’enrichissement de la biodiversité des sols. Il a mentionné, à titre d’exemples, l’agriculture biologique, la culture sans travail du sol, la rotation des cultures et l’agriculture de conservation.

Le prix Roi Bhumibol de la Journée mondiale des sols, du nom du défunt souverain de Thaïlande, a été décerné au Conseil indien de la recherche agricole (ICAR) pour sa détermination à faire prendre conscience de l’importance que revêtent des sols en bonne santé. Son Altesse royale la Princesse Maha Chakri Sirindhorn de Thaïlande remettra officiellement ce prix à Bangkok en janvier 2021.

  1. Thanawat Tiensin, Représentant permanent de la Thaïlande auprès de la FAO, a déclaré que la pandémie actuelle nous montrait combien notre santé était précieuse et fragile et que, pour la protéger, nous devions commencer par les sols. Cela passe par la protection de leur biodiversité.

Dans le cadre de la Journée mondiale des sols 2020, la FAO, l’Union internationale des sciences du sol (UISS) et le Partenariat mondial sur les sols ont également dévoilé le nom des lauréats du concours de livres scientifiques pour enfants sur la biodiversité des sols.

Le premier prix a été attribué à The science and spectacle of Soil Life by Roly Poly de JiaJia Hamner (illustratrice indépendante, États-Unis d’Amérique) et à Sharada Keats (Alliance mondiale pour l’amélioration de la nutrition, Royaume-Uni). Vous pouvez consulter la liste complète des gagnants ici.

Mme Laura Bertha, Présidente de l’UISS, qui a révélé le nom des lauréats, a déclaré que la dégradation des sols était le problème le plus insidieux et que, pour le résoudre, nous devions nous concentrer sur l’éducation des enfants et des jeunes.

Par ailleurs, le système d’information sur les sols de l’Arménie a été lancé au cours de la manifestation.

La biodiversité des sols est menacée.

Dans le nouveau rapport de la FAO, la biodiversité des sols est définie comme la variété du vivant sous terre, des gènes aux espèces et aux communautés qu’elles forment, en passant par les complexes écologiques auxquels ces éléments contribuent et appartiennent – des habitats microscopiques jusqu’aux paysages.

Le rôle que joue la biodiversité des sols par l’intermédiaire des services écosystémiques qu’elle fournit est crucial pour l’agriculture et la sécurité alimentaire.

Les microorganismes des sols, par exemple, transforment des composés organiques et inorganiques en libérant des nutriments sous une forme assimilable par les végétaux. En outre, la diversité des sols contribue à améliorer la maîtrise, la prévention et l’élimination des organismes nuisibles et des agents pathogènes.

Cependant, la biodiversité des sols est menacée par les activités humaines, le changement climatique et les catastrophes naturelles.

L’utilisation excessive ou abusive des produits agrochimiques demeure l’une des principales causes de l’appauvrissement de la biodiversité des sols, ce qui réduit le potentiel de celle-ci.

Parmi les autres causes, citons la déforestation, l’urbanisation, l’intensification de l’agriculture, la pollution et la salinisation.

Biodiversité des sols et bien-être des populations humaines

Les microorganismes présents dans les sols peuvent contribuer fortement à atténuer les effets du changement climatique. Ils jouent un rôle clé dans le stockage du carbone et la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Dans son rapport, la FAO indique que les activités agricoles sont la première source d’émissions de dioxyde de carbone et de protoxyde d’azote par les sols.

La biodiversité des sols contribue, directement et indirectement, à la santé humaine. Plusieurs bactéries et champignons vivant dans les sols servent traditionnellement à produire de la sauce de soja, du fromage, du vin et d’autres aliments et boissons fermentés. Les végétaux produisent des substances chimiques, telles que des antioxydants, qui stimulent notre système immunitaire et participent à la régulation des hormones. Par ailleurs, des microorganismes présents dans les sols peuvent aider à prévenir les maladies inflammatoires chroniques, y compris les allergies, l’asthme, les maladies auto-immunes, les maladies inflammatoires de l’intestin et la dépression.

Depuis le début des années 1900, de nombreux médicaments et vaccins ont été élaborés à partir d’organismes vivant dans les sols, notamment des antibiotiques courants comme la pénicilline mais aussi la bléomycine, utilisée dans le traitement des cancers, et l’amphotéricine, un antifongique. Alors que les maladies causées par des microorganismes résistants ne cessent de progresser, la biodiversité des sols peut offrir d’immenses ressources pour la mise au point de nouveaux médicaments.

La voie à suivre

Globalement, on constate que les données détaillées, les politiques et les mesures relatives à la biodiversité des sols font défaut aux niveaux local, national, régional et mondial.

Afin de mieux comprendre les facteurs qui menacent la biodiversité des sols et de mettre en œuvre des politiques et des réglementations pertinentes, il est crucial d’investir dans des évaluations de cette biodiversité qui soient harmonisées à l’échelle mondiale, de normaliser les protocoles d’échantillonnage et d’analyse afin de permettre la collecte de grands ensembles de données comparables, et de promouvoir l’utilisation d’outils de suivi efficaces pour consigner l’évolution de la biodiversité des sols.

Enfin, la FAO souligne, dans sa publication, la nécessité de promouvoir des technologies novatrices en matière de gestion des sols. Les nouvelles techniques moléculaires qui reposent sur le séquençage de nouvelle génération, par exemple, permettent de mieux connaître les organismes vivant dans les sols et l’incidence qu’ils sont susceptibles d’avoir sur les systèmes de culture connexes.

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