Le boom de la bauxite en Guinée étant appelé à se poursuivre, il est impératif que le gouvernement continue à renforcer ses capacités de supervision du secteur minier et à protéger les droits des communautés concernées. Le gouvernement devrait commencer par adopter une réglementation – qui a trop tardé depuis l’arrivée du code minier de 2011 – avec un système uniforme d’indemnisation et des normes pour les acquisitions foncières dans le secteur minier. Le gouvernement devrait également, avec le soutien des bailleurs de fonds internationaux, renforcer les institutions gouvernementales aux niveaux national et local afin qu’elles puissent assurer un contrôle efficace et plus régulier sur les sociétés minières. Pour permettre aux organisations de la société civile de compléter ce contrôle, le gouvernement devrait s’assurer que le secteur fonctionne avec plus de transparence, notamment en exigeant la publication des études d’impact environnemental et social (EIES), des plans de gestions environnementales et sociales, des rapports de suivi périodiques du gouvernement et des entreprises, et des données publiques sur l’impact sanitaire et environnemental de l’exploitation minière – que ces données viennent du gouvernement ou des compagnies minières.
Bien que la responsabilité de protéger les communautés incombe principalement au gouvernement guinéen, les entreprises ont aussi l’obligation de veiller à ce que leurs activités n’aient pas d’impacts environnementaux, sociaux et humains négatifs. Les entreprises devraient fournir aux ménages qui perdent leurs terres en raison de l’exploitation minière une aide au remplacement des terres ou au maintien des moyens de subsistance, en veillant à ce que toute indemnisation financière permette une autosuffisance économique. Compte tenu de l’impact particulier de l’exploitation minière sur les femmes et des obstacles que celles-ci rencontrent quand elles déposent des plaintes, les entreprises devraient régulièrement consulter les femmes et prévoir dans les recours des solutions spécifiques les concernant. Les entreprises devraient également contrôler la qualité de l’air et de l’eau, publier les résultats de ces études et expliquer au grand public les risques potentiels d’une dégradation de la qualité de l’air ou de l’eau pour la santé. Elles devraient enfin veiller à ce que leur personnel dispose de ressources et de formations adaptées pour contrôler efficacement l’impact de l’exploitation minière et mettre en place des mécanismes de règlement des griefs efficaces pour remédier aux conséquences négatives de cette exploitation. Les institutions financières internationales, dont la SFI, devraient veiller à ce que les entreprises respectent les normes exigées par les accords de prêt, notamment en effectuant des contrôles de conformité réguliers et, le cas échéant, en décidant de sanctions appropriées.
Lorsque les sociétés minières ne respectent pas leurs obligations, le gouvernement et le parlement guinéens devraient exiger qu’elles rendent des comptes. Même si le gouvernement privilégie le développement en cherchant à attirer des investissements dans le secteur, il devrait également limiter, suspendre ou stopper les projets miniers quand les entreprises bafouent de façon flagrante ou persistante les protections environnementales, sociales et humaines inscrites dans la loi guinéenne. Si le gouvernement ne parvient pas à faire respecter ces règles, l’exploitation minière, loin de devenir une force pour le développement de la Guinée, pourrait continuer à menacer gravement les moyens de subsistance et les modes de vie des communautés concernées.
Lu dans le rapport du Human Rights Watch publié en Octobre 2018