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La croissance exponentielle du numérique constitue une menace pour le climat et les ressources naturelles, révèle The Shift Project. Le think tank recommande d’adopter urgemment un scénario de sobriété numérique.

« Hors de la sobriété, point de salut. On aura beau faire tous les gains d’efficience, ils n’absorberont pas la croissance des usages« , explique Hugues Ferreboeuf. Cet expert a dirigé un groupe de travail sur l’impact environnemental du numérique pour le think tank The Shift Project. Les conclusions de ses travaux ont été dévoilées jeudi 4 octobre lors d’un colloque.

Alors que le numérique est perçu comme ayant des effets systémiques positifs, notamment par son accompagnement de la transition énergétique, la dizaine d’experts mobilisés montre au contraire que, dans ses usages actuels, il constitue un risque pour le climat et les ressources naturelles. « La transition numérique telle qu’elle est actuellement mise en œuvre participe au dérèglement climatique plus qu’elle n’aide à le prévenir« , alertent les experts, quelques jours avant la publication du rapport spécial du Giec sur les moyens permettant de limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C. Des conclusions qui rejoignent les préconisations du livre blanc « Numérique et environnement » publié en mars dernier par l’Iddri, la Fing, WWF et GreenIT.fr.

Surconsommation numérique

Il faut dire que la consommation actuelle du numérique explose. L’empreinte énergétique directe des serveurs, réseaux et terminaux, qui tient compte de l’énergie utilisée pour leur fabrication comme pour leur utilisation, progresse au rythme insoutenable de 9% par an. « L’intensité énergétique de l’industrie numérique augmente de 4% par an, à contre courant de celle du PIB mondial qui décroît de 1,8% par an« , pointe Hugues Ferreboeuf. Dans le collimateur des experts ? L’usage de la vidéo, en premier lieu, dont la consommation explose malgré sa surconsommation énergétique. En particulier les vidéos de « petits chats » et le porno pointées par les participants du colloque. « L’impact énergétique du visionnage de la vidéo est environ 1.500 fois plus grand que la simple consommation électrique du smartphone lui-même« , illustre le rapport.

C’est ensuite le nombre et la fréquence de renouvellement des terminaux, essentiellement des smartphones, qui posent le plus gros problème. « Il faut consommer environ 80 fois plus d’énergie pour produire « un gramme de smartphone » que pour produire « un gramme de voiture »« , explique Maxime Efoui-Hess, l’un des contributeurs du groupe de travail.

Cette surconsommation résulte essentiellement des pays dits « développés », même si la maîtrise de la transition numérique dans les pays du Sud constitue un véritable enjeu. « En moyenne en 2018, un Américain possède près de 10 périphériques numériques connectés, et consomme 140 Gigaoctets de données par mois. Un Indien possède en moyenne un seul périphérique et consomme 2 Gigaoctets« , illustre le rapport. « En outre, les taux de croissances les plus forts sont constatés là où l’équipement est déjà le plus important, c’est-à-dire en Amérique du Nord et en Europe », explique Hugues Ferreboeuf.

Cette surconsommation capte une part importante de l’électricité disponible ainsi que des métaux rares et critiques nécessaires à la fabrication des équipements. Aussi, le numérique apparaît plus comme un frein à la transition énergétique que comme un facilitateur, bien qu’il puisse aider à réduire les consommations de manière sectorielle et malgré l’efficacité énergétique croissante des technologies digitales. Son impact climatique se révèle préoccupant, la part du numérique dans les émissions de gaz à effet de serre ayant augmenté de moitié depuis 2013. « Les évolutions actuelles des impacts environnementaux du numérique vont à l’encontre des objectifs de découplage énergétique et climatique du PIB fixés par l’Accord de Paris« , conclut le rapport.

Changer le moins souvent possible les équipements

Alors que faire face à ce constat alarmant ? Le think tank propose un scénario de sobriété énergétique qui permettrait de ramener la hausse de la consommation d’énergie du numérique à +1,5%. Pour cela, il préconise de systématiquement « acheter les équipements les moins puissants possibles, à les changer le moins souvent possible et à réduire les usages énergivores superflus« .

Cela doit passer préalablement par la prise de conscience de l’impact environnemental de ces technologies. Il s’agit d’intégrer les impacts environnementaux du numérique comme critère de décision dans les politiques d’achat et d’utilisation des équipements. A cet effet, « nous avons développé un référentiel permettant de décrire l’empreinte environnementale du numérique, embryon d’une base de données qui permettrait d’effectuer des bilans carbone des grands projets numériques« , explique Maxime Efoui-Hess. « La pression de l’offre (Gafam, BATX) et les attentes de croissance du PIB associées à la numérisation ne peuvent servir de seuls juges dans la sélection des projets numériques« , estiment les auteurs.

Mais le scénario de sobriété énergétique du think tank prévoit malgré tout une augmentation du volume des données échangées et une stabilisation de la production des smartphones et téléviseurs au niveau de 2017. Par conséquent, il ne suffira pas à lui seul à réduire l’empreinte environnementale du numérique et est incompatible avec les objectifs de l’Accord de Paris, reconnaissent les auteurs. Des efforts supplémentaires sont donc nécessaires.

« Il faut rentrer dans le problème par le réglementaire« , estime Jean-Marc Jancovici, qui rappelle qu’historiquement la technique n’est jamais arrivée à rattraper l’inflation des usages. « Mais c’est aussi une chance, estime le président du Shift Project. Les ingénieurs français étant très bons dans l’optimisation sous contrainte« .

Actu-environnement.com

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