A travers un entretien exclusif accordé à la rédaction de guineeminesnature.com, le Directeur Général Adjoint Exploitation et Qualité de la Société des Eaux de Guinée ( SEG) s’est exprimé sur le projet PACT. Un projet initié par le département en charge de l’eau sur financement de la Banque mondiale à hauteur de 5 millions de dollars. Le programme a pour objectif de répondre aux besoins de la population en matière de fourniture d’eau potable. Selon Thierno Mamadou Nassirou Diallo, depuis l’avènement du CNRD, la fourniture d’eau à la population guinéenne est devenue une priorité pour l’Etat.

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GMN: Bonjour Monsieur le Directeur !

Nassirou :Bonjour !

GMN ! Pouvez-vous nous parler du projet PACT ?

Nassirou : Le projet PACT est un Projet d’Amélioration des performances des Critères Technico-commerciaux des agences de la SEG. Il a été initié par la Société des eaux de Guinée. Après son initiation, on a demandé un accompagnement auprès de la Banque Mondiale. Alors le projet, lui-même, découle d’une situation alarmante de constat sur le terrain. Pour votre information, la capitale Conakry est alimentée par deux types de sources d’eau: il y a les eaux de surface qui sont captées au niveau des rivières ou des cours d’eau et les eaux souterraines qui sont captées à travers des forages. La capacité installée en matière de capacité de production d’eau de la SEG est de 150 000m3 jour de volume d’eau produit qui arrive sur Conakry. Quand vous faites le cumul de tous les sites, tels que : Yessoulou qui se trouve dans Kouriah à Coyah, et les autres sites qui servent à alimenter la population de Conakry, comme le site de Kakimbo, le site au pied du mont Kakoulima, le site de Bassiyah, de Kobaya, du Stade 28 septembre et au bloc des professeurs. Donc c’est un ensemble de sites installés qui produisent de l’eau et qui servent à l’alimentation de la population de Conakry.

De ce volume produit, très malheureusement se référant aux missions devolues à la SEG, qui sont celles de production d’eau potable comprend: le captage, le transport, la production, le traitement, la distribution et la mise à disposition des populations, éventuellement la facturation et le recouvrement. Alors, il est apparu un déséquilibre entre le volume produit et le volume souvent facturé chez les clients. De ce déséquilibre, il en est sorti des volumes hyper importants que nous perdons dans la nature. Certes, ces pertes se résument en plusieurs catégories. Mais la plus importante c’est celle qui est la perte physique qui découle de la casse des tuyaux de conduite ou des branchements des fuites d’eau que vous voyez sur le terrain.

Pouvez-vous nous expliquer comment se fait le régime de l’alimentation dans la zone de Conakry?

Le régime de l’alimentation de Conakry se fait par délestage. La principale cause est liée de fait qu’il y a une inadéquation entre ce que nous, nous produisons et la demande. Donc la demande est très croissante et l’offre disponible est très petite et insignifiante. Ce qui nous a amenés au niveau de la SEG d’initier un mécanisme de délestage permettant à tour de rôle d’envoyer une partie de l’eau produite aujourd’hui sur la zone haute, et demain sur la zone basse, et ainsi de suite. Ce qu’on appelle la gestion rationnelle des ressources en eau, pour pouvoir donner au maximum de la population celle qui est produite.

A combien peut-on estimer le nombre d’abonnés de la SEG au niveau de Conakry.

Le chiffre existe, ça va vous paraître un peu bizarre tenant compte de la population globale de Conakry. Mais si nous prenons le dernier recensement, nous tournons autour de 140 000 abonnés. Et figurez vous que ce n’est pas tous ces abonnés qui ont de l’eau.
Il faut que je vous souligne un aspect très important. Vous savez, les infrastructures en alimentation de l’eau potable se conçoivent sur des périodes actuelles et projetées à des périodes futures, en tenant compte bien entendu de la demande du moment de la conception du projet et d’un horizon qu’on peut se fixer. Mais très malheureusement, Conakry connaît un retard dans les investissements pratiquement depuis plus de 22 ans. Les années 2000, les relations entre offre et demande étaient complètement stabilisées, mais  à partir de 2001 une inadéquation est venue s’insérer. Donc la demande est devenue plus grande que l’offre.

Selon vous qu’elle peut être la solution ?

Il y aurait dû avoir des investissements anticipés pour pouvoir venir absorber les demandes qui pourraient s’exprimer d’année en année. Mais très malheureusement de 2000 jusqu’à date , il n’y a pas eu d’investissement massif qui permet de mobiliser même un petit volume de m³ d’eau supplémentaire. Donc ce qui fait que pour apprécier l’accès à l’eau, en tout cas en se fiant au nombre d’abonnés, on peut se tromper. Comme vous remarquez nous avons des abonnés au niveau de Conakry, et il y a des quartiers l’année dernière qui avaient de l’eau, aujourd’hui qui se retrouvent sans eau. Il y a des quartiers qui ont cessé d’avoir de l’eau depuis pratiquement cinq ans, certains depuis dix ans et d’autres depuis quinze ans. Et jusqu’aujourdhui, ils n’ont pas une goûte d’eau. Quelle est la principale cause de ce problème?

Vous avez apporté quelques solutions, mais quel peut être problème réel?

Vous savez, c’est d’année en année que conakry se propage et l’extension de la ville se fait de manière horizontale. Les eaux arrivent de Yessoulou qui se trouve dans Kouriah sur Conakry, et la presqu’île de Kaloum ici il y a beaucoup de réseaux. Les points de consommation qui se créent en amont causent des prélèvements en route , ce qui fait qu’au fur et à mesure l’eau qui devait arriver n’arrive plus. Et les nouveaux points de consommation qui se créent provoquent de la crise vers les consommateurs qui jadis avaient de l’eau.

Pensez vous qu’après l’exécution de ce projet, tous ces problèmes seront résolus ?

Ce projet une fois conduit a terme permettra de récupérer l’ensemble des volumes qui sont perdus . Il favorisera le retour de l’eau dans les ménages.

Quelle sera la suite au terme de ce projet PACT ?

Pour la suite, il va y avoir des actions de pérennisation du projet. C’est-à-dire, les actions qui sont en cours dans le cadre de ce projet sont des actions à pérenniser. Le projet certes il démarre il poursuit son petit bonhomme de chemin et il arrivera à son terme, et quand il arrive à son terme, les actions exécutées durant la phase du projet doivent être poursuivies par les agences. Les agences ont du personnel sous la main, elles doivent continuer à engager des campagnes de réparation des fuites, de réduction des fraudes, voire même leur éradication totale. C’est des actions courantes qui ne doivent pas s’arrêter dans la feuille de route de toutes les agences commerciales.

Dites-nous, quel sera donc l’engagement de la SEG vis à vis de ses clients ?

Comme le disent ses attributions, l’engagement de la SEG est de conduire sa mission de service de fourniture d’eau à la population urbaine de Guinée. Ce n’est pas seulement Conakry. Sur les 33 préfectures de la Guinée, nous sommes dans 30 préfectures, plus Conakry. Nous sommes disposés et engagés à conduire notre mission de service de fourniture d’eau potable en milieu urbain. Cela sous-entend quoi? C’est de produire de l’eau de qualité propre à la consommation, débarrassée de tous genres pathologiques. Figurez vous que l’essentiel des maladies proviennent de l’eau. Et si le service de fourniture d’eau est fait de façon qualitative cela va de soit que les clients seront forcément satisfaits.

Concernant l’utilisation rationnelle de l’eau de la SEG, quel message lancez-vous à la population ?

Le message que nous allons lancer à la population guinéenne, c’est d’adopter la culture du civisme. Je rappelle que sur bien des endroits, les infrastructures de la SEG font l’objet d’agression. L’ensemble de nos sites aujourd’hui font l’objet de vandalisme. Donc l’appel que je lance à la population c’est adopter un comportement de civisme, de préserver les installations, éviter d’occuper les sols de manière à se rapprocher des entreprises à plus forte raison de construire les édifices sur les conduites. Ce sont les sites qui sont hyper sensibles, on ne le souhaite pas mais s’il y a des accidents ça peut même porter des préjudices à la vie humaine. Et derrière, c’est également de s’acquitter des factures. D’aucuns diront que la Guinée est le Château d’eau de l’Afrique de l’Ouest, il y a abondamment d’eau, il est inconcevable que les gens paient. Je rappelle ici que la SEG ne vend pas de l’eau, pour la simple preuve que vous pouvez aller dans n’importe quelle rivière ou fleuve, vous prenez le volume d’eau qui vous convient personne ne va vous dire de payer. L’eau est gratuite. Mais qu’est ce qui est payé ? C’est le service de cette fourniture d’eau qui est payé. C’est le coût de l’énergie qui est utilisé pour sa potabilisation , c’est le coût des produits chimiques, c’est la rémunération du personnel du service qui est dédié à son traitement, à sa distribution et à sa vente. C’est le service là qui est payé. Et cela a un prix. Donc le message que nous lançons est que la population accepte de payer leurs factures, refuse de se brancher clandestinement, refuse les arrangements dans les quartiers, puisque qui dit prolifération des branchements clandestins dit atrophier des recettes et détérioration de la qualité du service. Et nous, nous sommes condamnés à maintenir une bonne qualité du service. C’est pourquoi des efforts sont vraiment en cours au niveau de la SEG.

Ensuite, je profite de votre micro pour rappeler que désormais le secteur de l’eau est devenu une priorité pour l’Etat guinéen. Récemment nous avons fait une réunion avec le Directeur général de la SEG, avec l’avènement de la transition. La mission qui nous a été dévolue c’est de tout mettre en œuvre pour que le souci de l’eau soit une histoire lointaine. C’est pourquoi nous avons vraiment pris tout l’engagement pour que désormais l’eau puisse être une priorité pour l’Etat. C’est pourquoi aujourd’hui l’eau est devenue un intérêt commun, un sujet d’actualité qui se discute et qui s’échange sur tous les points de discussions. Ce qui fait très récemment que nous avons eu l’autorisation de souscrire pour l’organisation du congrès africain de l’eau et de l’assainissement. Je vous apprends que Conakry va abriter le 22ème congrès en février 2024.

Il y a quelques mois, nous avons organisé le forum de l’eau qui avait réuni autour de la table des experts venus du monde entier pour discuter des sujets de l’eau, des problématiques, les partages d’expérience. Autour de la table, il y a eu des différents bailleurs de fonds, des partenaires techniques et financiers qui sont intéressés. Tout cela aussi a découlé d’une situation d’étude d’analyses du secteur de l’eau. Puisque Conakry et les villes de l’intérieur ont fait l’objet d’une étude de schéma directeur qui a sorti un diagnostic de l’état actuel du service: une analyse de la ressource en eau, les besoins actuels et les besoins futurs . Une étude a aussi accompagné ces deux rapports, une étude du plan directeur avec identification des différents scénarios techniques d’aménagement, de réalisation des infrastructures où la SEG et les cabinets qui ont réalisé ces études ce sont retrouvés et ont décidé de meilleur choix possible, et de ce meilleur choix technique, une étude d’analyse economique et financière en a découlé qui a ressorti les coûts d’investissement qu’il faut, et pour Conakry et pour l’intérieur du pays. Ce qui fait qu’aujourd’hui nous avons une cartographie, nous avons une fiche de synthèse qui décrit exactement avec la plus grande clarté, la plus grande précision quels sont les besoins en termes d’investissement pour mobliser les ressources. Quels sont les besoins en termes de réalisation des conduites de transport, les stations de traitement, les ouvrages de stockage, des réseaux de transport et de distribution. Et même les réalisations de branchements, pour pouvoir rehausser le taux d’accès et envoyer l’eau dans tous les ménages. Aujourd’hui ces rapports sont disponibles. Et une campagne de mobilisation des fonds est en cours.

Alors quelle est la part de contribution de l’Etat dans tout ça?

Effectivement, de ce forum l’Etat a affirmé par les voix les plus autorisées qu’il s’engage, quel que soit le coût, à prendre en charge 20% du montant de l’investissement à réaliser. Dans les autres pays c’est très difficile de voir 5 % d’engagement de l’Etat. Cette fois-ci l’Etat guinéen s’est engagé à mettre sur la table 20%, c’est une première. Cette première est à saluer. C’est pourquoi il faut informer la population que ces différentes peines pour avoir de l’eau aujourd’hui sont tombées dans les bonnes oreilles. L’Etat en a fait sa priorité.

Merci Monsieur Diallo de nous avoir accordé cet entretien.

C’est moi qui vous remercie !

Entretien réalisé par Younoussa Sylla, pour guineeminesnature.com

Tel: 624 36 64 35

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