Six mois après l’investiture de George Weah, le bilan en demi-teinte de la nouvelle présidence du Libéria en matière de liberté de la presse amène Reporters sans frontières (RSF) à rendre public ses propositions pour améliorer l’environnement des médias et des journalistes.
Les premiers pas de George Weah à la tête du Libéria ont été marqués par une série d’attaques verbales à l’égard des journalistes. Le président lui-même s’en est pris au correspondant de la BBC, Jonathan Paye-Layleh, l’accusant lors d’une conférence de presse le 22 mars dernier d’être “contre lui” dans son combat pour les droits de l’homme pendant la guerre civile au Libéria. Peu de temps auparavant, c’était le vice-ministre de l’Information, Eugenne Fahgnon, qui a publiquement souhaité que les médias restent “pauvres et fauchés pour les 12 prochaines années”.
Le climat est tel que le syndicat de la presse du Libéria (PUL) a dénoncé “l’allure rapide avec laquelle l’intolérance officielle pour le journalisme indépendant augmente au Libéria » dans une lettre ouverte adressée au Secrétaire général des Nations unies le 11 avril dernier. Deux jours plus tôt, l’équipe entière du quotidien Frontpage Africa avait été arrêtée et auditionnée par la Cour civile à propos d’un article visant des proches du parti au pouvoir.
Parallèlement, le président Weah n’en est pas moins sur le point de réaliser l’une de ses promesses de campagne en décriminalisant les délits de presse. Un projet de loi abrogeant la diffamation à l’encontre du chef de l’Etat et des autorités publiques ainsi que la sédition par voie de presse du code pénal de 1978 est actuellement étudié par les parlementaires.
“Le toilettage du code pénal est un préalable indispensable à l’amélioration du cadre légal pour les médias et les journalistes libériens, salue Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique de RSF. Mais, nous invitons maintenant le président Weah à aller plus loin, notamment en condamnant systématiquement toute les attaques verbales et les arrestations arbitraires visant les journalistes dans son pays.”
Cette année, le Liberia est passé de la 94e à la 89e place sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF. Le 2 juillet, RSF avait adressé une lettre au président George Weah pour lui faire part des recommandations de l’organisation. En les rendant publiques, Reporters sans frontières souhaite encourager leur mise en oeuvre rapide pour permettre au pays de continuer à progresser dans le Classement.
Recommandations de RSF
- Tenir les promesses faites durant la campagne électorale en garantissant la liberté de la presse, le pluralisme des médias et le traitement équilibré de l’information sur les médias publics
- Condamner systématiquement les attaques verbales, les actes d’intimidation et les accusations sans fondement, en particulier lorsqu’ils viennent de responsables politiques afin de ne pas détériorer l’environnement dans lequel travaillent les journalistes
- Poursuivre et traduire devant la justice les responsables d’actes de violence afin de renforcer l’état de droit et de mettre fin à l’impunité concernant les crimes commis contre les journalistes.
- Respecter les engagements du Liberia en vertu de la déclaration Table Mountain qui prévoit l’abolition des lois sur l’insulte et la criminalisation de la diffamation en Afrique signée en juillet 2012 par votre prédécesseur en adoptant au plus vite une loi décriminalisant les délits de presse comme le recommande le syndicat de la presse du Liberia (PUL).