Limiter les expositions à la pollution de l’air, aux pesticides et aux perturbateurs endocriniens figure parmi les priorités d’actions, définies par le Haut conseil de la santé publique, pour la nouvelle Stratégie nationale de santé 2017-2022.

La ministre de la Santé Agnès Buzyn a lancé, le 18 septembre, une concertation, qui impliquera les représentants du secteur de la santé, les élus et les usagers, sur les priorités du gouvernement à mettre en œuvre dans la nouvelle Stratégie nationale de santé 2017-2022. Après cette phase de concertation jusqu’à la mi-octobre, le public sera aussi consulté, en novembre, afin de recueillir leurs propositions. La stratégie sera adoptée en décembre 2017 par décret et « mise en œuvre dès 2018« , a indiqué la ministre. La prévention et la promotion de la santé sont l’une des quatre priorités de la stratégie nationale, définies sur la base d’un rapport du Haut conseil de la santé publique (HCSP). « Avec une attention particulière pour les publics précaires et les enfants », a souligné Agnès Buzyn.

Réduire les concentrations en particules fines et l’exposition aux pesticides

Dans son rapport, remis hier à la ministre, le HCSP identifie les risques sanitaires liés à « l’augmentation prévisible de l’exposition aux polluants et aux toxiques », parmi les « quatre enjeux prioritaires de santé ». Le HCSP considère par conséquent qu’il est « essentiel d’agir » sur l’exposition à des facteurs de risque environnementaux « qui risquent de s’aggraver dans le futur » : la pollution de l’air et les risques chimiques liés aux pesticides et  aux perturbateurs endocriniens.

Le HCSP rappelle que la pollution atmosphérique aux particules fines serait à l’origine de 48.000 décès anticipés annuels en France, d’après la dernière enquête de Santé publique France de juin 2016. Et il pointe du doigt ses conséquences en terme de coût estimé à 101,3 milliards d’euros annuels, selon le rapport du Sénat de juillet 2015. De plus, son rôle dans « les inégalités de santé impose de considérer la pollution de l’air comme un déterminant majeur sur lequel agir », ajoute-t-il. « Un accent particulier doit être porté sur les territoires où résident des populations modestes au plan socio-économique (…). C’est donc par les politiques d’aménagement urbain qu’il est possible de tenir compte de ces populations vulnérables et d’agir à la source sur l’exposition de la population aux polluants », préconise le HCSP. Il plaide aussi pour « l’interdiction » de construction de crèches et d’écoles maternelles à proximité de zones de trafic intense, « voire leur déplacement quand les mesures de qualité de l’air montrent une exposition inacceptable ». La pollution atmosphérique étant « un facteur d’aggravation des pathologies respiratoires de la petite enfance« .

L’exposition aux pesticides entraîne également une « augmentation de risque significative » pour plusieurs pathologies (principalement cancers et maladies neurologiques, troubles de la fertilité et du développement), selon l’expertise collective de l’Inserm de juin 2013. Son coût estimé en Europe est de 120 milliards d’euros par an et « il est difficile d’estimer le coût en Europe des conséquences de santé des pesticides, via leurs mécanismes de perturbation endocrinienne », ajoute le HCSP. En revanche, il existe des effets et des coûts indirects liés aux impacts sur l’eau potable, la flore et la faune. « Cette exposition, comme les autres expositions environnementales, est marquée par de grandes inégalités, les populations riveraines des zones d’épandage étant particulièrement exposées », prévient-il.

Les périodes de développement in utero, post-natale ou celle qui précède la puberté constituent en outre « des fenêtres particulières de sensibilité » aux effets des substances perturbatrices endocriniennes. « Mieux caractériser les expositions et les risques éventuels pour les populations sensibles pendant ces périodes constitue un enjeu de santé publique afin de prévenir les effets potentiels de ces substances sur la santé« , souligne aussi le HCSP. La France a été le premier pays en Europe à se doter d’une stratégie nationale sur le sujet.

Mieux lutter contre les risques environnementaux avérés

Le HCSP appelle, pour cette nouvelle stratégie gouvernementale, à lutter « efficacement » contre les risques environnementaux « avérés pour diminuer l’exposition des individus ». Pour « améliorer » la qualité de l’air extérieur, il s’agit de réduire les niveaux moyens annuels de concentration des polluants atmosphériques les plus problématiques afin d’atteindre les objectifs de l’OMS, notamment la valeur de 10 microgrammes par mètre cube d’air (µg/m3) pour les particules fines PM2,5. Dans son rapport de 2012 « Pollution par les particules dans l’air ambiant », le HCSP préconisait une étape intermédiaire avec la valeur annuelle de 15 μg/m3, à ne dépasser dans aucune agglomération française à échéance de 2020. Pour améliorer la qualité de l’air intérieur, le Plan sur la qualité de l’air (PQAI), démarré en octobre 2013, doit également être « pérennisé« , en particulier pour les actions portant sur la rénovation thermique des bâtiments en relation avec l’application de la loi de transition énergétique, afin de « garantir un air intérieur sain, tout particulièrement dans les établissements recevant de jeunes publics (crèches, écoles maternelles et primaires) et les hôpitaux. »

Enfin, pour diminuer l’exposition professionnelle et environnementale aux pesticides, les travaux de mise en œuvre de la campagne exploratoire de mesures dans l’air extérieur, prévus par le Plan national santé environnement 3, « doivent être diligentés dès que possible avec des financements adaptés en tenant compte de la diversité des utilisations de ces produits », recommande le HCSP. « Le choix des sites doit être soigneux, afin que les substances retenues puissent être étudiées de façon exhaustive sur l’ensemble du territoire national de façon représentative ».

Le HCSP estime également nécessaire de documenter les liens entre les pratiques agricoles et leur présence dans l’air visant à diminuer les expositions des riverains. « A cet effet, des études visant à caractériser les imprégnations, couplées aux mesures dans l’air ou les autres compartiments sont à initier, informations dont certaines pourraient être mises en relation avec les données sanitaires ». Le HCSP demande aussi « sans attendre, de faire appliquer strictement par les autorités compétentes » l’interdiction des épandages aériens ainsi que les restrictions sur les traitements par aérosol, lorsque ceux-ci sont appliqués proches de zones résidentielles ou d’écoles. En outre, l’objectif de réduction de 50% du recours aux produits phytopharmaceutiques en France « doit être tenu en accord avec la feuille de route du plan Ecophyto II « .