La Guinée, pays situé en Afrique de l’Ouest, dispose d’un littoral long de plus de 300 kilomètres bordant l’océan Atlantique. Ce littoral, autrefois source de prospérité économique et culturelle, est aujourd’hui menacé par un phénomène croissant : l’érosion côtière. Ce processus peut être accéléré par des facteurs anthropiques, notamment l’urbanisation rapide, l’exploitation non durable des ressources naturelles et le changement climatique.
Depuis plus d’une décennie, le pays est confronté à la disparition progressive de ses plages, à la submersion des terres agricoles, et à la destruction des écosystèmes marins. Ces phénomènes ont des répercussions considérables sur la vie quotidienne des populations côtières, sur la biodiversité et sur l’économie nationale. Cette crise écologique est exacerbée par le changement climatique, qui accentue la montée du niveau des mers et la fréquence des tempêtes.
Dans cet article, nous explorerons les causes et les conséquences de l’érosion côtière en Guinée, en donnant la parole à des citoyens concernés, tout en mettant en lumière les enjeux environnementaux et sociaux liés à cette question.
Les Causes de l’érosion côtière en Guinée
L’érosion côtière en Guinée résulte d’un ensemble de facteurs naturels et humains. Parmi les principales causes figurent la montée du niveau de la mer, les tempêtes et les vagues de forte intensité, qui ont été provoquées par le réchauffement climatique. L’activité humaine, notamment l’urbanisation anarchique et la construction des infrastructures, joue également un rôle central.
« Le changement climatique est une réalité. Avant, on pensait que le changement climatique était seulement en Europe. Mais aujourd’hui, nous constatons que c’est devenu une réalité chez nous en Afrique. Actuellement, tout le monde connait le dérèglement climatique qui se passe entre la saison sèche et la saison des pluies. Si vous constatez, on n’est même pas sorti de la saison des pluies, la nature commence à être chaude. Pour moi, la cause de tout ça est la coupure des bois. En plus, quand on coupe les bois, on ne reboise pas les espaces déboisés », a fait savoir Yamoussa Fofana, vice-président en charge de la gestion de la plage Bénarès située à Faban au quartier Yimbayah, dans la commune de Matoto.
En Guinée, l’élévation de la mère menace directement les communautés côtières, notamment celles de Conakry, mais aussi d’autres régions telles que Boffa, Dubréka et Forécariah. A cela s’ajoute l’urbanisation croissante sur le littoral, accompagnée de la construction de routes et de bâtiments sans étude préalable de l’impact environnemental, accélérant ainsi l’érosion. La destruction des mangroves, qui servent de barrière naturelle contre l’érosion, augmente également ce phénomène.
» Chez nous ici, il ya une interdiction formelle de couper les mangroves. On n’a jamais accepté qu’on détruise ces mangroves. Seulement, on n’a pas assez de pouvoir pour imposer les règles aux gens pour qu’ils puissent arrêter de couper la mangrove. La seule chose qu’on fait, c’est de les sensibiliser. C’est pourquoi nous demandons toujours à l’Etat de nous aider dans ce sens « , a ajouté Fofana.
L’érosion côtière affecte également les terres agricoles. Dans les zones côtières, l’eau salée pénètre dans les sols, les rendant stériles et impropres à la culture. Les agriculteurs locaux, qui cultivent des produits comme le riz, le manioc, la patate et d’autres cultures maraîchères, voient leurs rendements diminuer chaque année. Cela affecte leur sécurité alimentaire et leur revenu, entraînant un exode rural vers les zones urbaines.
« Cette année ( 2024, ndlr ), on a fait cinq ( 5 ) champs, mais malheureusement nous n’avons pas réussi dans deux ( 2 ) champs. C’est-à-dire, deux de nos champs se trouvant au bord du fleuve ont été inondés. Ces deux champs se trouvent dans les bas-fonds qui ont été inondés par les fleuves Kolenten et Kora associés. Imaginez les dépenses des équipes qui viennent travailler. D’abord on avait finit d’ensemencer le premier champ. Au moment où on venait pour ensemencer le 2ème, le premier était déjà inondé. Le 2ème champ aussi, dès qu’on a commencé, une partie a été engloutie et tout a été ravagé par les eaux. Et finalement on a laissé ces deux champs pour s’occuper des 3 autres », raconte El hadj Mohamed Keita, un agriculteur victime d’inondations que nous avons rencontré dans ses champs rizicoles situés dans la préfecture de Kindia.
L’érosion côtière menace directement la vie des habitants des régions littorales. À Conakry, de nombreux quartiers sont régulièrement inondés, notamment ceux situés près des plages. Les populations vivent dans une insécurité permanente, sachant que leurs maisons et leurs terres peuvent être menacées par la mer à tout moment. Selon un bilan « provisoire » établi au mois d’août dernier par le gouvernement à travers l’Agence Nationale de Gestion des Urgences et Catastrophes Naturelles, 3 437 ménages ont été touchés par les inondations, impactant environ 17 185 personnes
Aminata Diallo, une habitante de la commune de Dixinn, à Conakry, témoigne : « L’érosion a déjà englouti une grande partie de notre plage. L’année dernière, ma maison a été inondée après une forte pluie. Les vagues montent de plus en plus chaque année, et nous n’avons plus où aller. C’est un vrai cauchemar ».
Face à la gravité de la situation, plusieurs initiatives ont été mises en place pour lutter contre l’érosion côtière en Guinée. De nombreuses ONG et associations environnementales mènent des programmes de restauration des mangroves, en impliquant les communautés locales. Ces initiatives visent à replanter des arbres et à sensibiliser la population à l’importance de ces écosystèmes pour la protection du littoral et la préservation de la biodiversité. Toutefois, ces solutions sont coûteuses et doivent être accompagnées de mesures écologiques pour être durables.
Depuis quelques années, le gouvernement guinéen a intégré la problématique du changement climatique et de l’érosion côtière dans ses stratégies de développement. Il prévoit des mesures pour protéger les communautés côtières et promouvoir une gestion durable des ressources littorales. Cependant, la mise en œuvre de ce programme reste un défi en raison de la faiblesse des financements et du manque de coordination entre les différentes parties prenantes.
Younoussa Sylla, pour Guineeminesnature.com