La Guinée est un scandale géologique, dit-on. Elle dispose à titre d’illustration de l’une des plus importantes réserves de bauxite au monde, une ressource naturelle essentielle pour la production d’aluminium. Pourtant, force est de constater que peu d’entrepreneurs guinéens ont réussi à s’imposer dans ce secteur stratégique.

Cette situation est en grande partie due aux contraintes réglementaires qui entravent l’implication des acteurs locaux. En effet, la réglementation actuelle ne laisse que peu de place aux entrepreneurs nationaux, qui se voient relégués à des rôles de sous-traitants ou de loueurs de véhicules, avec des marges bénéficiaires bien insuffisantes.

Cette situation est préoccupante car elle empêche l’émergence d’une véritable classe d’hommes d’affaires guinéens capables de tirer pleinement parti du potentiel offert par l’exploitation minière. Or, le développement économique durable d’un pays passe nécessairement par la valorisation de ses ressources par ses propres citoyens.

C’est pourquoi le gouvernement guinéen devrait impérativement revoir sa réglementation afin d’obliger tout investisseur étranger à s’associer à un partenaire guinéen. Cette mesure permettrait non seulement un meilleur partage de la valeur ajoutée, mais aussi un indispensable transfert de technologies et de savoir-faire.

De nombreux autres pays d’Afrique et d’Asie ont déjà mis en place ce type de politiques avec succès. En Malaisie par exemple, cette exigence d’association avec des entrepreneurs locaux a permis l’émergence de véritables milliardaires nationaux dans des secteurs clés comme les hydrocarbures ou les télécoms.

Il est grand temps que la Guinée emprunte cette voie si elle veut vraiment tirer le meilleur parti de ses ressources naturelles et permettre à ses citoyens de s’enrichir pleinement. Seule une telle approche pourra garantir un développement économique durable, au bénéfice de tous les Guinéens.

Actuellement, l’exploitation minière en Guinée est largement dominée par de grandes multinationales étrangères. Certes, ces investissements étrangers génèrent des revenus fiscaux pour l’État guinéen, mais les retombées économiques directes pour la population restent très limitées. La plupart des emplois qualifiés, des contrats lucratifs et des marges bénéficiaires sont captés par ces groupes internationaux.

Le manque d’entrepreneurs guinéens de premier plan dans le secteur stratégique des Mines traduit une forme de dépendance économique vis-à-vis de l’extérieur. Or, pour assurer un développement économique durable, il est essentiel que les Guinéens puissent s’approprier pleinement les leviers de ce secteur. Cela passe nécessairement par la création de champions nationaux, capables d’investir, d’innover et de rayonner à l’international.

Faute d’entrepreneurs privés guinéens suffisamment puissants, il existe un risque que l’exploitation minière profite surtout à l’élite politique et à ses proches.

À l’inverse, la promotion volontariste d’une classe d’hommes d’affaires guinéens prospères dans les Mines pourrait avoir de nombreux effets bénéfiques. Outre un meilleur partage des richesses, cela permettrait de stimuler l’innovation, la création d’emplois et le transfert de compétences. À terme, ces milliardaires nationaux pourraient même contribuer au rayonnement international de la Guinée.

Face à ces enjeux, le gouvernement guinéen doit donc résolument s’engager dans des réformes ambitieuses visant à favoriser l’émergence de champions nationaux dans le secteur minier. C’est la condition d’un développement économique durable et équitable pour tous les Guinéens.

Younoussa TOUNKARA

Président : d’OSEE (l’Organisation Sociale des Entreprises en Évolution)