Debout au milieu des ordures avec son smartphone, la blogueuse guinéenne Fatoumata Chérif, 31 ans, capture une vidéo selfie à 360 degrés de son environnement.  Elle appelle cela un ‘selfie-déchets’.

Depuis 2017, Fatoumata tire parti de la technologie et des médias sociaux pour attirer l’attention sur le problème de la gestion des ordures dans son pays d’origine, notamment sur tous les déchets qui ont envahi les bords de mer de la capitale, Conakry. (Voir ici)

« C’était devenu quelque chose de normal ; les déchets étaient là tous les jours et ce n’était plus un problème. Je me suis dit qu’il fallait attirer l’attention des citoyens, mais aussi des gouvernants. »

Face à cette réalité, Fatoumata s’est mise en action : elle a conçu une stratégie basée sur la prise de selfies, qui sont des clichés ou de courtes vidéos d’elle-même avec un fond montrant des déchets dans les espaces publics de sa ville. Son objectif était de sensibiliser le public au problème des déchets à Conakry et de mobiliser le soutien des communautés pour nettoyer les espaces publics. Une fois qu’elle a publié les ‘selfies-déchets’ en ligne, les gens les ont partagés et ont commencé à faire des commentaires, et vu l’intérêt du public, Fatoumata a décidé de passer des médias sociaux à l’action sur le terrain. Elle a rapidement été rejointe par une équipe de bénévoles, d’autres jeunes qui ont été attirés par la cause et ont décidé de rejoindre cette action communautaire.

« Les jeunes, lorsqu’ils sont sensibilisés à un problème, peuvent agir. »

Ensemble, ils ont décidé de nettoyer la plage de Tombo à la pointe de Conakry et la plage de la Minière – un quartier populaire – qui était devenue une décharge. Pendant plusieurs mois, l’équipe s’est réunie tous les dimanches jusqu’à transformer la plage en une zone attrayante pour les activités sportives et récréatives. Pour ces deux nettoyages, près de 400 jeunes volontaires et issus d’associations locales ont été mobilisés. (Voir plus)

« Nous avons choisi de nettoyer la plage de Tombo parce qu’elle se trouvait devant une école et nous avons pensé au message que cela donnait aux enfants à qui l’on apprend que l’environnement doit être préservé, alors que devant eux, la plage était devenue une décharge. »

Fatoumata est fière que l’initiative ‘selfie-dechets’ ait maintenant été reproduite dans plusieurs pays d’Afrique, notamment en Mauritanie, au Sénégal, au Cameroun, à Maurice et à Madagascar.

Aujourd’hui, Fatoumata s’est lancée dans une nouvelle mission en utilisant les technologies de l’information pour favoriser l’engagement civique. L’objectif principal est de promouvoir et d’éduquer les jeunes sur les lois existantes liées au changement climatique, à la désertification et à la préservation de l’environnement.  Elle explique : « Si nous ne savons pas que ces lois existent, nous ne pouvons pas vraiment contribuer à leur mise en œuvre sur le terrain»

Elle collabore avec des partenaires locaux et internationaux, dont des étudiants d’universités  guinéennes, pour développer une application, une carte interactive qui permettra aux citoyens d’être alertés et de signaler les problèmes environnementaux.

Pour Fatoumata, si son pays veut atteindre les objectifs de développement durable, il est crucial de stimuler le changement au niveau local et d’impliquer les communautés.

« Si nous n’arrivons pas à changer quelque chose au niveau local, nous ne pourrons pas atteindre les objectifs mondiaux et donc à mon niveau, je devais faire quelque chose  en tant que citoyenne. »

Fatoumata ambitionne d’impliquer beaucoup plus de jeunes dans le recyclage en créant des emplois verts. « Les jeunes peuvent être une partie de la solution en s’insérant dans la chaine de valeur des déchets. Cela permettra non seulement de réduire notre impact écologique, mais aussi de générer des ressources » .

Article sur Fatoumata Chérif dans le Bulletin N3 UNISS

The griot 3rd edition fr UNISS from Fatoumata Chérif