(Agence Ecofin) – Face à ses nombreux défis, l’Afrique peine à accéder à des ressources financières comme c’est le cas pour d’autres régions du monde. Un renforcement dans la mobilisation des ressources domestiques est vital, selon la Banque africaine de développement.

Prenant la parole en ouverture de la Conférence économique africaine, ce 2 décembre à Sal au Cap-Vert, le professeur Kevin Urama (photo), économiste en chef par intérim et vice-président gouvernance économique et gestion des connaissances au sein de la Banque africaine de développement (BAD), a estimé qu’il est urgent pour les pays africains d’améliorer la mobilisation de leurs recettes fiscales.

« Il est essentiel que les pays africains augmentent leur base d’imposition en s’attaquant aux goulets d’étranglement structurels tels que la faiblesse des structures organisationnelles, les faibles capacités des fonctionnaires fiscaux et le manque de techniques modernes et informatisées de gestion des risques », a fait savoir le responsable qui parlait au nom de son président Akinwumi Adesina.

Cette déclaration est survenue à la suite du constat sur la difficulté pour les pays africains de mobiliser suffisamment de ressources pour faire face à la covid-19. Elle intervient à un moment où, en plus de l’atteinte des objectifs de développement durable, l’Afrique doit financer la transition énergétique ou être contrainte de faire face aux conséquences des changements climatiques. Dans les deux cas, les solutions d’accès aux ressources sont limitées.

« On estime que les recettes publiques ont diminué en moyenne de 10 à 15 % en 2020, en Afrique subsaharienne, le ratio moyen recettes/PIB diminuant de 2 points de pourcentage pour atteindre 18 % en 2020 contre environ 20 % en 2019. Certaines estimations en 2020 indiquent que les restrictions liées à la covid-19 auraient diminué les exportations africaines de 17 %, entraînant une baisse de 5 % des recettes publiques », a expliqué M. Urama.

Avant la pandémie, le groupe de la BAD avait estimé que les besoins d’investissement dans les infrastructures africaines pouvaient à eux seuls se situer entre 130 et 170 milliards $ par an. Ce qui représente un déficit de financement annuel de 68 à 108 milliards $. Ce déficit était estimé à environ 26 milliards $ par an dans le domaine de la santé publique.

Malgré les progrès considérables réalisés par les gouvernements africains pour améliorer les systèmes financiers du continent et accroître les niveaux d’inclusion financière, il reste encore beaucoup à faire pour réduire l’écart existant entre épargne et investissement.

Aussi, le continent perd des ressources financières non négligeables. Selon la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement, les flux financiers qui quittent illicitement l’Afrique sont évalués à 84 milliards $ par an, selon une analyse effectuée pour la période allant de 2010 à 2018. Plus récemment, Tax Justice Network a révélé dans son rapport sur l’Etat de la justice fiscale, le fait que le continent a perdu un montant estimé à 17,1 milliards $ de recettes budgétaires en 2020 du fait de l’évitement et l’évasion fiscale des multinationales et fortunés. Une ressource qui aurait permis de vacciner complètement 82% de sa population, selon les estimations de ses experts.

De nombreux gouvernements africains, parfois poussés par la société civile active dans le domaine, ont ces dernières années, travaillé à améliorer la mobilisation des recettes fiscales qui soutiennent plus de 75% des dépenses publiques, en raison d’un difficile accès aux marchés des capitaux internationaux. Mais de nombreux efforts restent à faire. Les dirigeants sont encore réservés à prendre de sérieuses mesures pour les investissements directs étrangers et un endettement plus pertinent.

Idriss Linge

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